Le skate, une histoire de style ou de culture ?

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L’aura underground de la culture skate s’est imposée partout, et surtout dans la mode.

Depuis sa naissance dans les années 1950, le skate n’a cessé de gravir les échelons tout en conservant son aura de culture underground et populaire. 

À ce qui paraît, l’idée de visser des trucks surmontés de roues sur une planche en bois viendrait d’un surfeur californien frustré de ne pouvoir glisser sur l’eau par mauvais temps. Sous le nom de Roller Derby, le skate s’officialise en 1959, et ravit les nouveaux « surfeurs d’asphaltes ». La pratique se développe lentement mais sûrement, et passe du statut de jouet à statut d’équipement sportif. Nous sommes dans les années 1960, et le premier contest de skate est organisé à Hermosa Beach en Californie. C’est notamment pendant cette décennie que la marque mondialement connue Vans est créée, incitant d’autres à se mettre en place : Etnies, Converse et DC Shoes se font une place sur le marché du footwear et du streetwear.

La planche à roulettes s’exporte outre-Atlantique grâce aux soldats américains, et impose Munich comme capitale du skate en Allemagne ! Après la fabrication (enfin!) de roues en uréthane en 1972, une matière plastique beaucoup plus souple et adhérente que les anciennes roues en argile, il devient moins complexe de réaliser des tricks et de rider de nouveaux types de modules : rampes, knickers, et surtout skatepark.

En 1978, Alan Gelfand invente le Ollie. Figure incontournable, cette dernière révolutionne la pratique et donne naissance au street skateboarding. Ouais, ça y est, le premier skatepark a été construit, le matériel devient plus performant, et le Ollie existe. On a là tous les ingrédients nécessaires à l’ascension du skate !

Et c’est ce qui va se passer.
En 1981, le célèbre magazine Trasher est crée avant de devenir une référence pour le street skate, la scène core et le punk rock. La presse se développe, de nouveaux médias se lancent dans l’aventure et provoque alors l’émergence de nouvelles techniques de diffusion du sport : la vidéo et la photographie.
Une des plus grosses compétitions internationale de skate voit le jour en Allemagne, les « Munster Monster Mastership », mettant en concurrence les plus grands skateurs pro du monde entier. Maintenant, on peut vivre de la ride en étant sponsorisé par des entreprises comme Powell Peralta, Santa Cruz ou Vision.

Bien que le skate ait connu une période de déclin dû à l’arrivée de nouveaux sports, la pratique est restée malgré tout une référence et une source de création pour beaucoup. Des marques comme Chocolate, Girl et Flip rendent le matériel accessible et de qualité à tout le monde, et des compétitions ne cessent d’être organisées aux 4 coins du globe.

Au-delà d’être une pratique sportive et un métier à part entière, ce qui fait l’identité du skate est aussi, et surtout, le lifestyle qui l’accompagne. Depuis toujours, il est associé à la liberté de vivre, l’expression spontanée, et même une sorte de rébellion. Au début, le skateboard est une alternative pour les surfeurs. Ensuite, il rentre dans le système économique et se démocratise plus précisément sur la côte Est et la côte Ouest. Deux côtes, deux styles de vie différents. En Californie, on est détendu et peace tandis qu’à New-York la jeunesse est plus ancrée dans les rues et le béton. Ainsi, le rock domine dans la Silicon Valley tandis que le hip-hop s’impose du côté de l’Atlantique.
Pour ce qui est des sapes, on va regarder tout ça de manière un peu plus large, car nous sommes tous d’accord pour remarquer l’uniformité des tendances par delà des frontières.

Les années 70 

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Entre 1955 et 1965, ce sont des skateurs en shorts courts, t-shirts moulants, Converse et head-band que l’on voit rider des piscines.
Dans « Les Seigneurs de Dogtown », tu auras un bon aperçu du #swag en place aux origines californiennes !

Les années 80

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skateculturePar la suite, le perfecto en cuir, le style plutôt punk et grunge s’impose à contrario des t-shirts bien kitch à la Waikiki. Mais si, tu vas voir, tu t’en souviens. Une affirmation identitaire forte se met en place et oppose deux « way of life » contraires mais malgré tout semblables dans leur dynamique contre-cultureelle.

Les années 90

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10 ans plus tard, autre tendance naissante pour atterrir dans la galaxie du XXL. Influences hip-hop sous le bras, les skateurs s’éclatent en baggy et t-shirt bien trop grands pour eux, mais confortables à souhait.

Les années 2000

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Enfin, on arrive dans les années 2000. Le style du skateur n’est plus réellement identifiable car tous se mélangent. Pièces à noter éventuellement: casquette, slim, pull, gilet à capuche. Dans mon jargon personnel, j’appelle ces personnes des « coreux« . 😉 Cependant, les influences des styles cités précédemment sont à prendre clairement en compte, permettant à tout un chacun de se tourner vers ce qu’il préfère.

Une évolution des styles richissimes et assez drôles finalement mais toujours représentative d’une culture populaire à contre-courant. Comme l’affirme le sociologue de la mode Pascal Monfort pour la Gaïté Lyrique, « Le skate est un mouvement contre-culturel donc en avance sur les tendances de la mode. Baggy, chemise à carreaux, musique (rock et rap). Exemple: les Beastie Boys. Aujourd’hui, le style skateur touche une plus grande diversité de personnes, car il est à mi-chemin entre élégance, chic et casual. Mélange entre grosses marques et petits labels indépendants et obscurs. Exemple: avant, un mec avec un t-shirt Supreme était à coup sûr un skateur, tandis que maintenant, on ne sait plus trop. »

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La perte de l’essence même d’un sport qui casse les codes de la société serait-elle réelle?

Peut-être.
Depuis quelques années, les grands noms de la mode se sont appropriés les codes du skateboard, censés redonner au consommateur une soif de liberté, ou du moins, l’illusion. Ainsi, on voit des publicités pour la marque Céline en 2011 mettre en scène Daria Werbory torse nu avec un skate sous le bras; une collaboration entre Hermès et Vans accompagnée d’une publicité télévision; une collection en édition limitée de boards par Marc Jacobs; un défilé Kenzo dans un skatepark à Paris en 2015.

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Nike SB pub Paul Rodriguez par tar_le_batar

Les exemples ne manquent pas pour te montrer l’omniprésence de la planche à roulettes dans la sphère modeuse. Certes, depuis que la pratique a acquit une notoriété et une reconnaissance sur tous les fronts, des célébrités sont l’égérie de marques comme Supreme. Cependant, c’est une dynamique de sponsoring que l’on observe et non de collaboration entre différents pôles.
Dans les années 70, la mode se focalisait sur les hippies, pour ensuite se tourner vers la culture punk et aujourd’hui avoir les yeux rivés sur le mythe du skateur cool et sans pression.

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Jason Dill, skateur et égérie de Supreme

Cette utilisation par les grandes marques est-elle bénéfique ? Une collaboration entre Mark Gonzales et Études Studio est-elle intéressante ? Des boards réalisées par Marc Jacobs sont-elles utiles ?
Ce sont clairement des questions que l’on se pose. Une collection entre Adidas Originals et Palace me semble plus légitime dans le sens où c’est l’objet d’une rencontre de deux créateurs sportifs dont l’objectif est de dépasser les limites de l’esthétique sportswear. À contrario, la commercialisation par Saint Laurent de deck de skate serait un beau pied de nez à une culture plus anti-capitaliste et anti-consumériste que luxueuse.

Ainsi, à quoi bon surfer sur la coolitude du skateur pour vendre des produits à une clientèle qui représente le parfait contraire de son modèle ?

Brbr

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