Cela faisait un bail. La dernière véritable nouveauté de la série Digimon Story remonte à Cyber Sleuth en 2015, avec un interlude Hacker’s Memory qui faisait davantage office de parenthèse narrative. Depuis, quelques rééditions… et un désert créatif pour les dresseurs de Digimon. Avec Digimon Story: Time Stranger, la série remet les pendules à l’heure. Le jeu ne cache pas son ambition qui est de retrouver l’ADN de la franchise tout en musclant l’expérience d’un RPG de collecte de créatures pensé pour 2025.
Dès les premières heures, on retrouve une ossature familière, enquête, monde réel et réseau, mais repensée et densifiée. La question brulante est, est-ce que Time Stranger fait mieux que Cyber Sleuth ? Oui, et pas qu’un peu, même si tout n’est pas parfait.
Un pitch temporel tendu et accrocheur
Vous incarnez un agent d’une organisation secrète chargée d’élucider des anomalies liées à des entités appelées “formes de vie à électrons de phase”, elles préfèrent qu’on les nomme Digimon. Une catastrophe aux allures d’apocalypse, survenant dès l’ouverture, vous propulse huit ans en arrière. L’objectif est de comprendre l’origine du désastre et trouver comment l’empêcher, en naviguant entre notre réalité et celle des Digimon.
Le récit ménage son mystère. Sans déflorer les surprises, l’arc narratif tient en haleine, avec une structure d’enquête qui rebondit intelligemment entre lieux et époques. Les personnages paraîtront peut-être un ton en dessous de ceux de Cyber Sleuth, mais l’intrigue principale gagne en ampleur et en cohérence à mesure que les pièces du puzzle s’imbriquent.
Deux réalités, deux époques : un terrain de jeu élargi
Les segments dans le Tokyo contemporain sont plus ramassés que dans Cyber Sleuth. Moins d’avenues à écumer, mais un tempo plus dynamique, la capitale n’est plus le centre de gravité, elle devient un tremplin narratif. Ce choix fluidifie la progression, tout en laissant la vedette à l’autre grande star du jeu.
Le gros lot, c’est l’Iliade, une itération du monde numérique influencée par les mythologies grecque et romaine, protégée par des gardiens au vernis divin. La cité centrale respire, densité de Digimon, PNJ à la pelle, micro-animations, rumeurs qui circulent… On a vraiment l’impression de se balader dans une métropole vivante.

Surtout, la variété des environnements fait un bien fou. Là où EDEN, dans Cyber Sleuth, finissait par afficher un look un peu uniforme, Time Stranger multiplie les biomes et micro-identités visuelles. On se retrouve avec une exploration qui gagne en souffle, sans s’égarer.
Direction artistique : style assumé, identités fortes
Techniquement, Time Stranger ne cherche pas à rivaliser avec les mastodontes photoréalistes. Le rendu évoque une “génération précédente”, mais compensée par une direction artistique inspirée et des modèles de Digimon retravaillés. Les créatures à poils affichent désormais des textures duveteuses visibles; les entités élémentaires, comme Meramon, bénéficient d’effets animés crédibles, ses flammes bouillonnent réellement, adieu l’aplat orange figé.
Ces touches font la différence, même sans surenchère technique, l’ensemble a du cachet, avec une lisibilité exemplaire en combat et en exploration.
Côté audio, la bande-son accomplit le job avec sobriété. Moins mémorable que celle de Cyber Sleuth, elle soutient les scènes clés sans saturer l’espace. Pour les nostalgiques, des DLC offrent le remplacement par des pistes issues des animés ou de Cyber Sleuth. Bonne nouvelle, la BO de base tient largement la route si on veut rester sur l’expérience “vanilla”.
Un système de combat affiné et plus nerveux

Le cœur du jeu, c’est le système de combat. On reste sur du tour par tour en 3v3 à la Shin Megami Tensei : lecture des types et éléments, anticipation des tours, punitions si on se trompe, gratification si on aligne les bonnes affinités.
Les vraies nouveautés sont côté ergonomie et rythme :
- Les compétences héritées ne sont plus gravées dans le marbre : elles deviennent des “objets” qu’on peut déséquiper et réassigner d’un Digimon à l’autre. Optimiser un moveset n’a jamais été aussi simple.
- Remplacer un membre actif par la réserve ou utiliser un objet ne consomme plus un tour entier. Cette seule décision rend les joutes plus stratégiques et moins frustrantes.
- La mécanique de triangle d’attributs coexiste avec des éléments dont l’efficacité varie selon l’espèce. Nuancé, mais lisible.
- Une jauge de Cross Art se remplit au fil du combat. Une fois déclenchée, elle débloque des capacités spéciales du joueur lui-même, aux effets variés, que l’on déverrouille progressivement.
En pratique, ça tape plus vite, ça réfléchit plus finement, et les boss sont mieux équilibrés. Le jeu suppose que vous utilisez vos objets, et ça change tout, car on réfléchit au tempo, au bon moment pour claquer un soin ou un buff, sans sacrifier le tour d’un allié clé.
Collection et progression : profondeur et contrôle
La boucle “capture-progression” reste au cœur poussant à scanner chaque Digimon rencontré; une fois un seuil atteint, on convertit les données pour l’ajouter à l’équipe. En combat, l’XP et les niveaux s’enchaînent; on apprend des compétences, on muscle les statistiques, on digivolve dès que les pré-requis sont atteints.
Mécanique signature, à chaque Digivolution (ou dé-Digivolution), le Digimon retourne niveau 1 mais son plafond de niveau augmente. Si vous butez sur une exigence d’évolution, revenir temporairement à une forme antérieure pour “regrinder” reste une stratégie payante.
Autre couche bienvenue, le niveau du joueur. Gagné en dépensant des points d’agent (histoire + quêtes), il débloque des Cross Arts et capacités passives, lesquels montent eux aussi en puissance. Les niveaux d’évolution les plus élevés nécessitent un palier de joueur, incitant à progresser sur les deux axes, c’est àç dire en équipe et en avatar.

L’optimisation passe par une nouveauté maligne, les Digimon “en trop” peuvent être “chargés” dans un autre. Le receveur récolte XP et statistiques selon l’évolution et le niveau du donneur. Tout le monde gagne de l’XP, même depuis la boîte, ce qui encourage à élargir sa collection. Besoin d’argent ? On peut aussi convertir en monnaie.
Surtout, la qualité de vie fait un bond, plus besoin d’un détour au Digilab pour convertir ou digivolver. On le fait directement depuis le menu. Cette fluidité change radicalement la cadence de jeu.
La Digifarm reste l’outil de fond. On y laisse des Digimon s’entraîner sur la durée pour peaufiner leurs stats et influencer leur personnalité. Celle-ci impacte les gains de statistiques à la montée de niveau, mais aussi l’accès à certaines passives. Cerise sur le gâteau, nombre de passifs débloqués via points d’agent s’appliquent aux Digimon de personnalités spécifiques, et certaines Digivolutions exigent d’ailleurs un profil donné. Idéal pour les amateurs de theorycrafting.
Quêtes secondaires et rythme narratif
Les quêtes secondaires restent dans les canons du genre, chercher un objet, affronter un adversaire, résoudre une situation. On récupère objets, argent et points d’agent. Certaines sont des one-shots, d’autres s’étirent en chaînes plus substantielles. Oui, certains arcs deviennent indisponibles à des moments précis; oui, ils réapparaissent plus tard. En pratique, le jeu avertit avant les seuils de verrouillage, évitant la frustration.
Grand changement par rapport aux anciens épisodes : elles sont désormais totalement optionnelles. Finie la sensation d’être “obligé” de faire du remplissage entre deux chapitres. Le rythme y gagne beaucoup, on suit l’élan de l’histoire quand on le souhaite, on digresse quand l’envie se fait sentir.
Seul point d’ombre, un lot de quêtes secondaires est verrouillé derrière des DLC payants. Elles ne donnent pas de points d’agent, mais ce verrou dès la sortie laisse un goût amer.
Face-à-face avec Cyber Sleuth : ce qui change vraiment
Time Stranger ne renie pas Cyber Sleuth; il l’affine.
- Plus de variété spatiale avec l’Iliade que dans EDEN, et un hub plus vivant.
- QoL majeures: compétences héritées rééquipables, changement/objets sans sacrifier un tour, digivolution et conversion depuis le menu.
- Combats plus nerveux, Cross Arts mieux intégrés et combinables, boss mieux équilibrés.
- Visuels retapés sur les modèles de Digimon (poils, flammes, effets), style artistique plus affirmé.
- Bémols: personnages un peu moins marquants, Tokyo plus discret, OST plus fonctionnelle que mémorable.
Au total, on parle d’une révolution mesurée : pas une table renversée, plutôt une montée en gamme nette sur tout ce qui compte manette en main.
Ses 5 points forts et 2 points faibles
| Points forts | Points faibles |
|---|---|
| 🟢 Direction artistique stylée | ❌ Personnages moins marquants |
| 🟢 Combats modernisés | ❌ DLC de quêtes |
| 🟢 Qualité de vie exemplaire | |
| 🟢 Progression profonde | |
| 🟢 Rythme narratif maîtrisé |
Quelques détails qui font la différence
- La combinaison triangle d’attributs + éléments pousse à diversifier les équipes et favorise la synergie plutôt que le mono-type.
- Le reset au niveau 1 après Digivolution ou dé-Digivolution récompense la planification et évite le power creep trop rapide.
- Les Cross Arts évolutifs créent un second axe de progression pour le joueur, avec de vraies décisions à prendre sur quels effets prioriser.
- L’avertissement avant les quêtes qui vont disparaître temporairement permet de jouer détendu, sans guide externe.
Le mot de la fin
Time Stranger réussit ce retour attendu avec un game design plus fluide, un combat affûté et une mise en scène plus généreuse côté monde numérique. Il ne renverse pas tout, mais il réenchante la boucle de la capture et de l’optimisation avec une cohérence rare. Si l’on met de côté quelques réserves, personnages moins mémorables, DLC de quêtes, on tient probablement la meilleure itération moderne de Digimon Story. Ceux qui aiment penser leurs tours, peaufiner leurs builds et sentir la progression système après système ont de quoi se régaler.

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