Vis ma folle nuit dans les catacombes de Paris
J’ai toujours voulu aller dans les catacombes. Attention, les vraies catacombes, pas la version officielle qui franchement, ne sert à rien. Heureusement pour moi, à la fac j’ai rencontré Charles*, un mec qui avait passé plus d’un an de sa vie à s’y aventurer, une fois par jour minimum. Un soir il m’y a emmené et je vais vous raconter comment j’ai failli y rester.
Tout a commencé un soir de juin.
Nous sommes quelque part dans le 91, je rejoins mes potes pour l’apéro, il est aux alentours de 20heures. Enfin, quand je dis « potes » en réalité, sur les 12, et je n’en connais que 3 . Les autres étaient très sympas, dans le style punk à chien mais je n’ai rien contre ça, juste que ce ne sont pas les personnes avec qui j’ai l’habitude de traîner. Il y aussi une fille que je ne sens particulièrement pas mais bref. On est tous chez un ami de Charles, on boit et aux alentours de 22h30 on se décide à partir. Bien sûr, on est en retard et pour ne pas rater le RER, Charles court pour bloquer les portes, et paralyser tout le réseau pendant 5 minutes, le temps qu’on arrive. Nous voici arrivés à porte d’Orléans, il est 23heures. On prépare nos mixes d’alcool, on attend un peu et on voit, vers 23h30 deux personnes ouvrir une plaque d’égout en plein milieu de la place et s’y engouffrer. Même s’ils essayent d’être discrets, ils sont plus que grillés. Alors imaginez, 30 minutes plus tard, douze bonhommes rentrer en file indienne avec des frontales sur la tête.
On soulève donc une première plaque, on descend et on arrive à un 1er palier à environ 2 mètres sous terre. C’est un lieu d’entretien pour les égoutiers de Paris – du moins je suppose. On voit un 2ème trou, on s’y faufile et arrivons cette fois-ci environ à 10/15 mètres sous terre. Sur le moment, la seule chose que je me dis c’est « comment des types ont-ils pu faire rentrer une échelle de cette hauteur sans se faire griller ». Nous sommes au 2ème palier, on allume nos lampes frontales car on commence à vraiment rien y voir. Pour accéder au 3ème et dernier palier, il faut descendre à l’aide de barreaux incrustés d’origines, rongés par la rouille. Un sur deux est cassé mais la descente est plutôt tranquille. On arrive tout en bas. Nous sommes environ à 30/35 mètres de profondeur. Là, je commence à comprendre pourquoi mon pote avait insisté pour que je ne porte que des vêtements auxquels je ne tiens pas. Résultat : je me suis ramené avec mes chaussures préférées et mon sac de cours sur le dos.
On s’enfonce dans la galerie, tout le monde suit religieusement mon pote. J’ai de l’eau jusqu’aux genoux. Bye Bye mes AirMax. Là je réalise aussi que les catacombes officielles c’est vraiment de la merde.
Nous marchons pendant environ 20 minutes à un rythme soutenu, c’est un véritable labyrinthe. La tension monte, l’excitation aussi.
Petit cours d’histoire des catacombes, enfin, ce que j’ai retenu. Il y a deux types de galeries : les galeries d’origines datant de l’époque de la construction des catacombes au XIXème, qui donnent accès aux différentes salles où étaient entreposés les cadavres et les « chatières« , des galeries creusées par les « cataphiles », nom donné aux usagers régulier du réseau souterrain, en opposition aux « touristes », c’est-à-dire des mecs comme moi.
Après 20 minutes de marche, on arrive dans une galerie, puis dans une salle où 20 personnes sont posées tranquillement en écoutant de la grosse techno et en buvant leur mélange alcoolisé. Charles, surnommé ici « Tolstoï« * (les cataphiles ne se connaissent que par leur surnom) – Il est russe, ils ne sont sont pas foulés pour le surnom – les connaît et nous invite à nous poser quelques minutes avec eux. Après un petit moment on bouge, on continue à marcher, on visite environ 4 salles.
On découvre ensuite la « salle de cinéma » de l’époque où les catacombes étaient beaucoup plus fréquentées, on continue et on ne reste jamais plus d’une heure dans une salle. Pendant notre balade, on croise un couple complètement perdu. Charles et un de mes potes décident – ils sont vraiment gentils – de les raccompagner et nous demandent de les attendre dans une salle située au bout d’une chatière. Celle est très étroite, pour parvenir à la salle au mieux on est accroupis, au pire on rampe. RIP mes fringues. Une fois dedans on met du son, on boit un peu de notre alcool, et on attend patiemment dans la bonne humeur. Après 20 minutes, 3 mecs et une nana débarquent, cagoulés. Un grand silence s’installe et je commence sérieusement à flipper. C’est là que pour briser le silence, une connasse qui faisait des blagues lourdes depuis le début de l’excursion leur sort en rigolant « Les gars, vous vous êtes trompés, Daesh c’est pas par là« . Contre toute attente, ils ne répondent rien, se regardent à peine et s’en vont. Une fois dans la chatière, on entend un bruit et on comprend qu’ils viennent de balancer un fumigène au plastique dans la galerie. Nous voilà bloqués à 35 mètres de profondeur, dans une salle qui sera bientôt couverte de fumée. Si on sort pour chercher Charles on se perd, si on reste on s’asphyxie.
Après 10/15 minutes on ne voit plus grand chose et on commence sérieusement à avoir des difficultés pour respirer. Charles finit enfin par débarquer. Il ne comprend rien à ce qui se passe et avant même de nous demander des explications il nous dit qu’on doit absolument sortir de là. On part tous, main dans la main à la queue leu-leu pour ne pas se perdre. Dans la chatière c’est un enfer, je dois mettre ma tête sous mon tee-shirt pour essayer de respirer de l’air à peu près convenable. Je suis en panique. Le calvaire dure environ 5 minutes. On sort et Charles nous explique que les cataphiles s’amusent souvent à bizuter les touristes, mais qu’il n’a jamais eu connaissance d’un coup pareil. Il est fou de rage et veut les retrouver pour leur casser la gueule. Après plusieurs minutes, il nous dit qu‘il s’occupera d’eux une prochaine fois et nous invite à aller dans une dernière salle pour finir l’alcool et se poser après cet évènement quelque peu traumatisant.
Je m’endors lourdement après avoir tué une bouteille de Gin. Vers 7h du matin, Charles me réveille. On y va. Là, j’ai qu’une envie c’est de sortir, je suis beaucoup trop bourré, je veux voir le ciel et surtout dire au revoir à cette connasse à cause de laquelle on a failli y passer.
On met 30 minutes à retourner à notre point de départ sous la porte d’Orléans. Il est 8heures du matin, Paris se réveille. Je prends le métro et je réalise que je suis littéralement couvert de boue, j’ai les mains dégueulasses, les chausses imbibées, je pue c’est une horreur. Je m’endors comme une merde et me réveille à 10heures. Je suis toujours dans le métro, en fait, j’ai fait 3 fois l’intégralité de la ligne 4. C’est un calvaire. 30 minutes plus tard j’arrive ENFIN chez moi.
Je ne me douche pas, j’enlève juste mes chaussures et je me rendors dans mon lit, complètement sec. À mon réveil, je réalise avec ironie que je suis moi aussi, devenu un punk à chien.
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