La revue d’art HEY! fait sa première expo-galerie à Paris

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Quand les regards se tournent vers l’autre art pop, celui qui dérange et fascine.

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Handiedan : Centauri in blue

C’est à Voltaire que nous avons rendez-vous avec Anne, co-fondatrice de la revue trimestrielle d’art figuratif, HEY! modern art & pop culture. À l’occasion de sa première exposition-vente à Paris, la Gallery Show #1, c’est autour d’un thé qu’une femme à l’allure mystique et rassurante nous reçoit dans son cabinet de curiosité pour parler d’art, de confiance en soi, et de philosophie . Une entrevue pas comme les autres, à l’image de ce qu’elle et Julien ont crée…!

Open Minded : D’où vient l’art que Julien et toi montrez dans la revue HEY!, depuis maintenant 2010 ?

Anne : Pour comprendre réellement d’ou viennent les artistes et l’esthétique qu’ils proposent, il faut avoir une petite connaissance de ce que sont les contres-cultures depuis 1970. HEY! porte la conviction que l’on vient de traverser 40 ans d’histoire de l’art déconstruite par l’art conceptuel et l’installation. L’art souterrain a toujours existé sauf qu’il n’était pas visible. Aujourd’hui, il est temps que l’on remette à l’honneur cet art figuratif. Il y a beaucoup de gens qui travaillent avec cet esprit, et que le grand public identifie comme de la pop culture. Sauf que celui-ci associe à la pop culture une culture de masse industrialisée et industrialisable, qui existe uniquement pour être vendue.

OM : Le terme de pop culture ne semble pas réellement correspondre à l’image de la revue, si l’on se fie à la définition littérale du terme pop.

Anne : Quand on a sorti le premier numéro en 2010, il n’y avait que des personnes comme nous qui le lisaient. Cela montre que l’on a toujours été assez peu en France. Puis après 2012, la revue a gagné en notoriété, jusqu’au jour de notre première exposition qui fût un réel succès ! Ca a été le cataclysme, car même les institutions artistiques ont découvert ce qu’elles ne voyaient pas depuis plus de 40 ans. Dès 2014, j’ai dû commencer à expliquer aux gens que nous ne défendions pas la pop culture de masse, mais l’autre pop culture.

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Mike David : Sans titre

OM : En art, il y a eu la Nouvelle Objectivité qui était une manière d’exorciser les maux de la société. Je ressens l’art de la revue de cette manière car il y a toujours un avis critique, une prise de position et la transmission d’un sentiment parfois très fort de la part des artistes. Est-ce que tu penses qu’en mettant de côté cette forme d’art « différent », les institutions ont en quelques sortes fermé les yeux dessus ?

Anne : Tu parles du marché de l’art, tout simplement. Ce que tu dis est une des vérité générale de l’art ! Un véritable artiste ne fait que s’auto-critiquer, expulser ou formuler quelque chose. Quoi qu’il arrive, c’est une opinion. Après, tu as les marchands qui contrôlent l’offre et les collectionneurs qui contrôlent les demandes, normalement. Les artistes qui ne produisent que pour être vendus sont ceux mis en avant, pourtant c’est un art manipulé, qui peut être vendu et revendu en seconde main. C’est un trésor de guerre.
Les arts qui nous intéressent pour HEY! sont ceux en marge, qui formulent la vérité de manière spontanée, ceux qui ne nécessitent ni de formation académique, ni d’importantes connaissances, ni de moyens financiers pour les pratiquer. Ce sont des arts auto-gérés : tu créés parce qu’il le faut. Et tu n’obéis pas au diktat du marché de l’offre et de la demande.

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Djess Erdeven : A la hussarde

OM : Alors, quelle est ta philosophie de vie ?

Anne : C’est la même philosophie que celle de HEY!, simplement. Au lieu de consommer quelque chose dont tu crois avoir besoin, essaye l’art chez toi. En publiant HEY!, on fait un geste peu anodin… Le papier est synonyme de trace et donc de durée. Et par extension, c’est le contraire de la société Kleenex, cette société dirigée par l’obsolescence et la sur-consommation. HEY!, c’est le radical et la différence, c’est la liberté de ne pas ressembler aux autres. Depuis que je suis adolescente, je pense vraiment que notre différence constitue notre richesse, et que si tu laisses une société aseptisée s’installer, tu risques de ne plus voir tout cela… J’ai réussi à rester vivante parce qu’à mon adolescence, j’ai écouté assez de musique qui m’a sur-pétée la tête et j’ai vu des tableaux qui m’ont fait pleurer.

Je suis quelqu’un de profondément curieux, les autres m’intéressent. Vous n’avez pas connu ce Paris là, mais avant il y avait beaucoup de clochardisation, mais pas comme celle que l’on connaît maintenant. Ces gens avaient traversé la guerre, c’était un choix pour eux que de vivre dans la rue. Tu traînais dans ta ville, il y avait des bancs partout, tu en choisissais un, et dans la journée, tu faisais la rencontre de cinq clochards qui étaient dans un sur-délire de vie que tu n’aurais pas pu imaginer ! Voilà, c’est ça mon amour des autres. Il y a toujours de la surprise et de l’insondable chez quelqu’un, et je pense que c’est précisément cela qui fait le jus et la beauté de la vie. Je vis pour ça, je vis pour la beauté des choses. Depuis mes 10-12 ans, j’ai décidé de ne pas subir et de prendre le contre-pied de tout ce que la société me soufflait. Hey! est là pour transmettre cette force de vie et de décision que l’on a, et pour montrer qu’il ne faut pas avoir peur d’y aller, de s’écouter.

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Hanawa Masayoshi : Fantasy Monster

OM : Concernant le Gallery Show #1, comment Julien et toi avez choisi les artistes ?

Anne : Nous nous intéressons depuis plus de 30 ans, alors vous pensez bien qu’on a beaucoup, beaucoup d’artistes à vous montrer ! À l’intérieur de ça, nous avons pris la décision de montrer qu’un médiateur entre le spectateur et l’oeuvre n’est pas obligatoire. A partir du 17 mars, ce seront des oeuvres qui n’ont pas besoin d’être expliquées que le public verra, pour qu’il ait le choix de dire simplement « J’aime » ou « Je n’aime pas ». Cette exposition est une toute première exposition-vente car je souhaite que quelqu’un qui n’a jamais acheté puisse s’offrir de l’art sans se ruiner !

Anne & Julien sont les deux fondateurs de HEY!, dont l’histoire a commencée en 2010. À ce moment-là, HEY! est la toute première revue européenne à mettre en lumière la culture artistique pop figurative. Et depuis, les choses vont de mieux en mieux, ce qui leur a permis de réaliser dès 2011 plusieurs grandes expositions à la Halle Saint Martin et au Musée du Quai Branly. La plus célèbre, « Tatoueurs, tatoués », s’est vue couronnée d’un immense succès à l’origine d’une tournée à l’internationale qui prendra fin en 2020. Et comme on ne change pas une équipe qui gagne, Anne & Julien sont du 17 mars au 22 avril 2017 à la Galerie Arts Factory pour présenter environ 200 oeuvres de 35 artistes venus de 13 pays différents. On y retrouve les illustrations des tatoueurs Pietro Sedda et Mikael de Poissy, aux côtés des sculptures crâniennes de Jim Skull. L’ironie des pilules de Dana Wyse sera au rendez-vous, de même que les statuettes aussi étranges que psychédéliques du japonais Hanawa Masayoshi ! L’exposition nous promet une plongée dans un autre monde fantasmagorique que l’on a hâte de découvrir…

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Stéphanie Lucas : Main Sauvage

La revue Hey! sort tous les trois mois dans les librairies françaises et ailleurs dans le monde, pour parler a ses lecteurs de l’autre art pop à travers le prisme de créateurs contemporains de tous horizons. Car comme Anne nous l’a si bien expliqué, c’est notre différence qui fait notre richesse. Et la partager est, selon elle, l’essence même de la vie.

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Merci à Anne et Ophélie pour cette très belle rencontre

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