La Birmanie, entre illusion d’une démocratie et crimes d’État

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En Birmanie, la démocratie, les droits de l’Homme, et la liberté ne sont pas à l’ordre du jour.

« Entouré par l’Inde, le Bangladesh, la Chine, le Laos et la Thaïlande, la Birmanie est un étonnant mélange de toutes civilisations, tout en possédant une identité qui ne ressemble à aucune autre » peut-on lire dans le Routard.com. Et à voir ça, on irait bien prendre le prochain avion en direction de la Birmanie pour déguster un succulent curry en face des temples majestueux de Rangoun ! Mais es-tu sûr.e de tout savoir sur ce pays, sa politique, et ses habitants ? Tu risques de changer d’avis…

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Dans l’État de Rakhine en Birmanie, vivent des personnes que l’on appelle les Rohingyas. Considérés comme des immigrés illégaux du Bangladesh, ces dizaines de milliers d’individus vivent un enfer au quotidien, maltraités, exclus, et privés de droits fondamentaux. Pourquoi ? On t’explique.
Suite aux nombreux affrontements entre bouddhistes et musulmans qui eurent lieu en 2012, les Rohingyas, birmans musulmans, ont fuit le pays pour s’installer dans des camps à l’écart. Face à cette minorité, l’armée birmane aussi appelée « Tatmadaw » n’y est pas allée pas de main morte, et ne semble pas prête à s’arrêter.

Le combat entre musulmans et bouddhistes fait de nombreuses victimes et traumatise tout un pays, sans que le gouvernement ne réagisse réellement. En Birmanie, les forces militaires occupent 25% des sièges au Parlement, contrôlent le ministère de la Défense, celui de la gestion des Frontières, et ont aussi le droit de veto pour les amendements de la Constitution. Alors, l’armée bénéficiant d’une puissance sans précédent se permet de faire tout et n’importe quoi, comme bon lui semble.

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Conseil d’État pour la Paix et le Développement de Birmanie

Il y a quelques jours, la Birmanie fêtait l’anniversaire de l’élection le 8 novembre 2015 de Aung San Suu Kyi, représentant le parti LND (voir l’article déjà écrit dessus). Détentrice du Prix Nobel de la Paix en 1991, et élue dans le cadre des premières élections générales libres, la femme qui était perçue comme censée rétablir la paix dans le nord du pays en calmant les affrontements entre l’armée et les guérillas d’ethnies minoritaires, semble ne pouvoir assumer ses responsabilités. Le peuple fier d’être parvenu à s’extirper de la dictature mise en place par Ne Win, doit encore faire face à une politique répressive et inégale.
Depuis que Suu Kyi est arrivée gouvernement, les choses ne font qu’empirer… Et les exemples ne manquent pas. Le week-end dernier, l’armée a mené un raid dans l’État de Rakhine où vivent les Rohingyas, les birmans musulmans évoqués plus tôt. À l’issu de cette attaque dont le but était d’éradiquer le terrorisme en ciblant un prétendu groupe d’extrémistes « Aqa Lul Mujahidin », 69 civils et 17 soldats ont trouvée la mort. Les Rohingyas pris pour cible étaient qualifiés par l’armée d’« assaillants violents ».

Ces musulmans sont pris au piège dans un pays où le gouvernement refuse de les accueillir et use toute son énergie à leur faire vivre un enfer. Depuis octobre 2016, l’armée birmane s’acharne :  des attaques plus régulières à l’égard des Rohingyas; le refus véridique d’admettre et de condamner les erreurs de ses militaires; une absence totale de liberté pour la presse et une autocensure imposée. Pour couronner le tout, une loi votée en 1982 interdit aux Rohingyas de réclamer la citoyenneté birmane, faisant d’eux des apatrides : des êtres humains dépourvus de nationalité et ne bénéficiants d’aucune protection de la part de l’État (selon la convention de New-York du 28 septembre 1954 qui définit comme apatride « Toute personne qu’aucun État ne considère comme son ressortissant par application de sa législation »).

[youtube https://www.youtube.com/watch?v=opMUonItCYw]

Ce sont les portraits de dizaines d’apatrides que l’on peut découvrir grâce au travail du photographe américain Greg Constantine. « Nowhere people », c’est un ensemble de clichés sublimant les apatrides du Bangladesh, du Népal, de Malaisie, de Thaïlande, d’Irak, de Serbie et bien d’autres contrées du monde entier. En se positionnant comme simple transmetteur d’information à la manière d’un photojournaliste, Constantine rend compte d’une dure réalité imposée à des individus qui se définissent eux-mêmes comme « entre le Ciel et la Terre ».

Il y a quelques temps, ce dernier est parti une année entière à la rencontre de ces « outsiders », puis réaliser une longue série de photographies en noir et blanc. Si on évoque cet homme, c’est pour une raison bien précise. Le 18 novembre 2016, Constantine devait inaugurer son exposition pour présenter son travail sur la minorité musulmane, en Birmanie. C’était sans savoir que dès son atterrissage, il allait être invité à prendre aussitôt l’avion retour. Ye Tu Oo, responsable de l’immigration, confirme aux médias que le photographe est bien sur « liste noire », et aussi interdit d’accès au territoire birman. Ou comment récompenser le travail d’une vie d’un artiste simplement altruiste, emphatique et concerné.

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Constantine
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Constantine
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Constantine

Tu l’as bien compris, la situation en Birmanie n’est pas vraiment la plus joyeuse qu’on puisse espérer… Malheureusement, le combat entre musulmans et bouddhistes n’a pas pris la tournure souhaitée par le peuple lors de l’élection de Suu Kyi en novembre 2015. La soi-disant démocratie qu’elle promettait de rétablir, est à des années lumières de ce qu’elle devrait être. Aujourd’hui, des membres du parti de la femme politique sont emprisonnés pour avoir critiqué des militaires; des civils sont condamnés pour avoir « intentionnellement voulu insulter les croyances religieuses » en montrant une image de Bouddha; les journalistes sont quant à eux emprisonnés pour diffamation; et des villages entiers sont détruits afin d’expulser les habitants.
La seule solution est alors de fuir. Partir, quitter le pays, et ne plus risquer sa vie menacée chaque seconde un peu plus par une force armée sur-puissante.

En Birmanie, quand le peuple pleure et que le gouvernement ferme les yeux, le Routard.com enrobe tout ça d’une bonne couche de relativisme subjectif : « Ce n’est qu’à partir de 2010 que la junte militaire s’assouplit peu à peu et que la population découvre le droit de s’exprimer librement avec les télévisions étrangères, les téléphones portables, Internet et les réseaux sociaux ». Aaaaah, le déni de vérité. Que ferions-nous sans lui ?

Sources
info-birmanie
le parisien
nowhere people

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