L’interview de Ryan Hemsworth

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Au pays du crack, de la jante chromée, du sourire doré et du rap red cup à la main, un gamin pâle comme un linge est en train de redessiner tranquillement les frontières du game. Ryan Hemsworth, né dans le trou du cul du monde, à Halifax (qui n’est pas le quartier chaud d’une bourgade quelconque) est en train de finir le boulot amorcé par des Shlomo ou Clams Casino : offrir des instrus au cœur tendre à des loulous de la street. Vous n’arrivez pas encore à prononcer son nom ? Entrainez-vous, car vous risquez d’en parler un paquet de fois dans les années à venir.

Et avant d’être acclamé par ses pairs pour l’ensemble de sa carrière en 2032, ou à la Machine le 31 Janvier dernier, Hemsworth est dans nos pages pour nous expliquer comment et pourquoi aller plus dur que dur dans la peinture. Tout un programme.

Selon moi, ton mix pour Fact est le meilleur de 2012 toutes catégories confondues. D’ailleurs j’ai noté un truc : tu as fait beaucoup de remix pour l’occasion (comme l’énorme Bill Russel de Waka Flocka Flame) et je me suis dit : « même lorsqu’il mix, Hemsworth reste producteur avant d‘être DJ ». Je suis dans le vrai ? Même lorsque tu mix, tu ne te contentes pas d’enchainer les titres, tu veux créer une œuvre à part entière ?
Ryan Hemsworth : C’est tout à fait ça, à 100%. C’est parce qu’avant de commencer à produire les miens l’an dernier, je ne pouvais jamais m’envoyer un mix dans son intégralité. Je suis quelqu’un de patient mais je pense que les mix devraient être plus créatifs. Si tu es prêt à t’assoir et m’écouter mixer pendant une heure, je veux que tu saches que je vais te donner de la matière étrange et de l’inédit. C’est toujours cool d’être surpris. Donc oui, je glisserai toujours des éléments de productions quand je mixerai.

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J’ai entendu dire qu’une fois tu as pleuré en écoutant du Waka Flocka Flame. Pourquoi ? Quel titre ?
Ryan Hemsworth : (rires, ndlr) Oui, il s’agissait de « Triple F Outro », un titre que je trouve juste triste, magnifique et hyper dramatique à la fois. C’était il y a moins de deux ans, okay… (rires, ndlr) Flocka est une légende. Il peut être à a fois un vrai roc et très ouvert émotionnellement. Ce qui m’a peut-être touché c’est que le titre aborde Slim Dunkin qui a été tué et qui d’ailleurs apparaît sur ce même album.

Ta carrière ne fait que commencer mais est-ce que tu as déjà songé à un premier album ? Tu sais déjà comment ce premier LP devra être ?
Ryan Hemsworth : je suis en train de bosser dessus pendant que je te parle. Il tournera probablement autour de dix titres, il y aura quelques featurings d’amis, rappeurs comme chanteurs, et j’essaie d’y incorporer un tas de styles différents que j’adore produire. La grande nouveauté c’est que je vais composer pas mal, il y aura moins de samples. Je vais même chanter un peu dessus – plus pour me sampler parce que je déteste ma voix généralement – je veux juste tout donner maintenant, après tous les différents projets que j’ai eu, je suis super excité.

Parlons de ton enfances (pas besoin de t’allonger) : qu’est ce que ça fait de grandir à Halifax (Canada) ? Ça a joué un rôle dans ta musique ?
Ryan Hemsworth : Halifax est cool mais ça ne m’a pas influencé musicalement pour autant. C’est une ville où il fait bon vivre, très canadienne (beaucoup de gens avenants). Mais il n’y a jamais eu une scène électronique proéminente, c’est pour ça que j’ai créé un réseau en ligne avec des artistes et amis d’un peu partout dans le monde.

Tu sembles aimer particulièrement la trap / crack / money music (Gucci Mane, Waka Flocka Flame…) mais ce que tu fais est éloigné de ça : c’est assez rêveur, quelque fois naïf, souvent très imagé et dramatique. Tu cherches à créer une confrontation avec ce curieux équilibre ?
Ryan Hemsworth : ouais, enfin je veux dire, j’essaie de comprendre pourquoi des choses aussi différentes me plaisent autant. J’adore le rap, la bass music mais aussi les atmosphères, d’où mon amour des OST et des choses du genre. Parfois je me dis que c’est parce que j’écoute 85% de la musique au casque. J’adore écouter des choses très en relief. Donc j’imagine qu’au travers des âges, j’ai appris à apprécier toutes les nuances du rap, dans ses aspects étranges ou expérimentaux parce que je viens d’un background plus éléctro-headphone-music.

Peut-être que tu cherches aussi à expérimenter dans la voie trapy-screwed de Clams Casino ou Shlomo. On ne cherche pas à faire des comparaisons, mais est-ce que tu te sens proche artistiquement d’eux ? Ou ce ne sont que des amis ?
Ryan Hemsworth : Je pense que nous occupons plus ou moins le même espace, c’est vrai. Je suis certain que nous avons grandi avec les mêmes influences ici et là. Tout le monde adore faire cette comparaison mais si tu écoutes attentivement chacun de nous tu vas deviner très facilement qui est qui, de par la structure de nos mélodies, les instruments, les samples, les choix… Il y a tellement de facteurs qui peuvent provoquer des changements à la dernière minute, lorsque tu produis, tu as ce vaste monde de technologie sous tes doigts donc c’est très difficile de créer le même titre que quelqu’un d’autre finalement. Mais stylistiquement c’est facile d’être proche les uns des autres.

Il y a quelque chose d’hyper dramatique dans ta musique, on imagine sans peine un film se glisser dessus. Le cinéma c’est quelque chose qui t’inspire ? Quel film tu verrais pour tes productions ?
Ryan Hemsworth : Oui, le cinéma m’inspire énormément. L’animé des 80’s, Akira est un gros exemple d’ailleurs. Dans la B.O, tu trouves des vocals hallucinants, des reverbs incroyables et des percussions tribales. Là, tu vois, il y a tout ce que j’aime

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Finalement, si je dis que ton travaille se glisse à merveille entre Hudson Mohawke et Three Six Mafia, je n’ai rien compris ?
Ryan Hemsworth : (rires, ndlr) Non, c’est parfait pour moi. Tellement de producteurs d’aujourd’hui doivent énormément à Juicy J & DJ Paul dans les beats ou les structures… Le dirty south a influencé tout le monde quelque part, que ça soit conscient ou pas.

Tu as travaillé avec Grimes, Main Attrakionz, Deniro Farrar, tu fais partie de Wedidit… Quel est le meilleur souvenir de ta jeune carrière ? Et qui serait ta collaboration de rêve maintenant ? A$AP Rocky ? Danny Brown ?
Ryan Hemsworth : Il n’y a pas si longtemps j’ai discuté avec Diplo et il me disait que j’avais besoin d’un meilleur nom comme « Dragonstone » (rires, ndlr) mais… ouais, j’ai déjà un paquet de connexions qui étaient inimaginables il y a encore deux ans. Je vais partir en tournée avec Daedelus en mars et c’est incroyable pour moi. Sinon, une collaboration rêvée, en ce moment, ça tournerait autour de Meek Mill, Jeremih ou Ryuichi Sakamoto (rires, ndlr).

Tu es un brillant remixeur, beaucoup commence à s’en rendre compte, mais quel est celui dont tu es le plus fier ?
Ryan Hemsworth : Peut-être celui que j’ai réalisé pour Tinashe sur son morceau « Boss ». C’était vraiment rigolo de faire quelque chose de riche et d’intelligemment sensuel pour une starlette du R&B. J’ai eu pas mal l’opportunité de réaliser des titres de ce genre ces temps-ci. Beaucoup de mes titres préférés ne sont pas encore sortis finalement donc je suis impatient de connaître les réactions du public.

Comme je disais précédemment, tu es un remixeur brillant mais est-ce qu’il y a toujours un titre que tu essaies de remixer sans parvenir à le faire ?
Ryan Hemsworth : un des remix que je préfère parmi tout ceux que j’ai pu faire concerne un titre de Dirty Projectors qui n’a jamais été validé par le label. Je choisirais celui-là du coup. C’est dur de commencer à bosser avec des majors et de tenter de produire ce que tout le monde est susceptible d’aimer.

Sam Tiba & Canblaster ont remixé un de tes titres. Quels autres Français font chavirer ton cœur et battre ton âme en ce moment ?
Ryan Hemsworth : Bromance m’a montré beaucoup d’amour ces temps-ci, il ont été les premiers Français à vraiment me contacter et me montrer du soutien. Brodinski est vraiment inspirant par sa quantité de connaissances – pas seulement quant à la club music ou la musique « efficace » – mais aussi sur le rap. Sinon je suis ami avec Piu Piu que je trouve fantastique et je suis fan de French Fries, Bambounou et… ouais, tous les membres de Club Cheval, un talent si unique !

Ryan Hemsworth + Cashmere Cat + UZ + Sound Pellegrino Thermal Team, tout ça au même endroit, la même soirée, oui Madame et on vous fait gagner des places.

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